David Orchard
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Winnipeg Free Press et Toronto Star, le 23 octobre 2003 (en anglais)

Une flagrante escroquerie

de David Orchard

D’ici au 12 décembre 2003, le Parti progressiste conservateur du Canada aura décidé s’il doit continuer d’exister ou pas.

Le Parti qui a été créé par John A. Macdonald et George Étienne Cartier en 1854, qui a fondé le Canada, qui a développé un réseau ferroviaire unificateur, qui a négocié l’entrée de l’Ouest dans la Confédération, qui nous a doté d’une deuxième société de chemin de fer nationale, qui a donné le droit de vote aux femmes, qui nous a légué la Banque du Canada, Radio-Canada et la Commission canadienne du blé, qui a donné le droit de vote aux Autochtones et qui a été le seul parti capable d’arracher le pouvoir aux libéraux, ce Parti, donc, est invité à se détruire, à se débarrasser de sa constitution et à attendre le couperet.

L’union de la droite, nous dit-on, est le seul moyen de battre les libéraux. Vraiment ?

Le succès du Parti libéral tient en partie à sa capacité d’occuper le centre de l’éventail politique. C’est lorsqu’il en fait autant que le Parti progressiste conservateur réussit à se faire porter au pouvoir.

Au début des années 50, le Parti fut boudé par l’électorat lorsqu’il afficha une position favorable à l’entreprise privée et se déplaça vers la droite. Il lui fallut attendre l’arrivée de John Diefenbaker et un repositionnement au centre pour regagner le pouvoir. Et pourtant, certains n’avaient pas hésité à qualifier de « Bolchevik des Prairies » celui qu’ils jugeaient « trop à gauche » pour diriger le Parti progressiste conservateur et qui, pourtant, obtint une majorité écrasante en 1958.

On nous dit aujourd’hui qu’il nous suffit de fusionner avec l’Alliance et de cesser de nous dire « progressistes » pour remporter la victoire.

Aurait-on pu penser qu’en 2003, des tractations feutrées dans une salle de conseil d’administration, avec chèques à l’appui, pourraient faire disparaître le plus ancien parti politique du pays ?

Ceux qui s’imaginaient que les orientations et la constitution du Parti étaient le fruit d’un débat, d’un vote et d’un consensus entre les membres vont tomber de haut.

Après le vote de dissolution du Parti, le nouveau « Parti conservateur » sera dirigé pendant une période indéterminée par un Conseil mixte intérimaire composé d’une douzaine de membres arbitrairement choisis, ce qu’un éminent conservateur a déjà assimilé à une sorte de « Conseil de gouvernement de l’Irak ». Jusqu’au nom du Parti, « Parti conservateur du Canada », qui nous est imposé...

Ils n’auront peut-être même pas le temps de consulter les membres au sujet de la constitution ou des orientations du Parti, à en juger par l’Entente de principe signée par Stephen Harper et Peter MacKay. Mais M. Harper est prompt à nous rassurer : l’Alliance canadienne a un bon programme électoral et une soixantaine de députés capables d’en faire la promotion aux prochaines élections !

Et si Paul Martin déclenche des élections avant que le « Parti conservateur du Canada » n’ait choisi son chef, ce n’est pas un problème non plus.

Voilà l’avenir qu’on nous propose en échange de la liquidation d’un parti vieux de cent cinquante ans.

Et comment va-t-on procéder pour le liquider ?

Apparemment, quiconque, y compris les membres actuels de l’Alliance qui ont pourtant un intérêt dans l’issue du vote, peut devenir membre du Parti PC et participer au vote le plus crucial de l’histoire de ce Parti. On les invite à « revenir au bercail » et, en même temps, à le démolir de l’intérieur.

Avec seulement une fraction de ses 100 000 membres, l’Alliance peut aisément noyer les votes des 40 000 membres du Parti PC. Brian Pallister, député allianciste, est fier de dire qu’il est membre des deux partis et qu’il a l’intention de voter deux fois, c’est-à-dire au vote de ratification de chaque parti. Il invite tous ses collègues de l’Alliance à en faire autant.

Dans son éditorial du 18 octobre, le National Post n’hésite pas à recommander la stratégie suivante :

« Il ne faut rien négliger pour assurer la déroute de Joe Clark, de David Orchard et des autres ennemis de la fusion. En fait, les membres de l’Alliance devraient adhérer au Parti PC afin de le noyauter et d’influencer le vote de l’intérieur. »

Stephen Harper avait de quoi se réjouir : le Père Noël était en avance cette année !

Pour éviter de tomber dans l’oubli à l’Ouest, l’Alliance avait besoin que les candidats progressistes conservateurs lui laissent tout le terrain.

Le chef du Parti progressiste conservateur a obligeamment sacrifié son parti pour sauver l’Alliance. Peter MacKay s’est même mis à faire la promotion du « mouvement conservateur au Canada ». Malheureusement, il n’a pas été élu pour diriger « le mouvement conservateur », il a été élu pour diriger le Parti progressiste conservateur du Canada, dont la constitution dispose que :

« Le Chef est le principal représentant public du Parti et il doit mettre en valeur le Parti, ses objectifs et ses principes. »

Comment peut-on en même temps mettre à mort le Parti et respecter l’obligation constitutionnelle de le promouvoir ?

Et quand cette nouvelle entité aura été écrasée par les libéraux, quelle excuse trouveront les fusionnistes pour justifier ce nouvel échec ?

Et que restera-t-il à ceux qui auront voulu empêcher que l’héritage de Cartier et de Macdonald ne soit sacrifié sur l’autel de l’ambition et du pouvoir ?

La route qui nous mènera au pouvoir n’a pas de raccourci. Nous devons d’abord rebâtir nos associations de circonscription, et adopter un programme qui réponde aux aspirations des Canadiens pour leur pays.

Ce n’est pas en signant en catimini un accord non autorisé, négocié à la hâte et ratifié au terme d’une flagrante escroquerie qu’on y parviendra.

Normalement, le nombre des membres d’un parti chute brutalement après l’élection d’un nouveau chef. Les milliers de personnes qui se sont inscrites au Parti depuis le 1er juin s’inscrivent à l’évidence dans ce processus de mise à mort d’un Parti qui avait pourtant, en 1999 et à nouveau en 2002, refusé massivement toute fusion avec un autre parti. Un vote honnête de tous les membres en règle aboutirait aujourd’hui au même résultat. Rien n’a changé depuis le 31 mai, lorsque 99 % des délégués au dernier congrès ont voté pour des candidats qui s’engageaient à préserver le Parti (le seul candidat fusionniste a obtenu moins de 1 % des votes). Peter MacKay s’est fait élire sur la foi d’un engagement explicite et signé de respecter la clause de la constitution du Parti interdisant toute fusion avec l’Alliance.

Samedi prochain, à Ottawa, le Comité de direction du Parti, c’est-à-dire ceux qui ont la charge et la responsabilité de promouvoir le Parti progressiste conservateur du Canada, décideront d’entériner ou non le noyautage frauduleux de notre Parti.

Si, en tant que membre du Parti et électeur canadien, vous redoutez la disparition de la seule option possible à un gouvernement libéral, faites savoir à ces trente-six personnes que le sort du parti qui a fondé le Canada est entre leurs mains.

Vous trouverez leur nom et leurs coordonnées sur le site Web du Parti à www.pcparty.ca .


David Orchard a été deux fois candidat à la direction du Parti progressiste conservateur du Canada. Il est l’auteur de Hors des griffes de l’aigle. Il exploite une ferme à Borden, Saskatchewan. On peut le joindre à 1-877-937-8263 et sur son site Web à www.davidorchard.com

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