Publié en anglais, Ottawa Citizen le 19 août 2005
(« The
end of NAFTA: Canada signed away its energy and got
nothing in return; the U.S. response to a recent lumber
ruling shows it's time to get out »)
La fin de l'ALENA
de David Orchard
Depuis vingt ans, ceux d'entre nous qui critiquent
l'accord du libre échange (ALE) et son héritier l’ALENA,
ont montré que ces accords ne nous ont pas donné le
libre échange mais nous ont coûté une bonne partie de
notre souveraineté et de notre bien-être national.
De nos jours, même ceux qui défendent l'ALE comme le
nirvana « de toutes les règles de base » au droit
d'accès au marché américain -- et comme une étape
essentielle pour arriver au libre-échange mondial -- ont
été obligés de faire face à de dures réalités.
Deux exemples récents méritent d'être analysés. La
Compagnie Nationale de Pétrole Offshore de Chine (CNOOC)
s'est récemment vue obligée de retirer son offre
d'acheter la Compagnie Union Oil de Californie (Unocal)
sur le marché libre à la suite d’une opposition
politique, sans précédent selon elle, de Washington. Le
Congrès américain a vu cette transaction comme une
menace à la sécurité de son énergie. La compagnie
Chevron, basée aux États-Unis, est certaine maintenant
d'acquérir Unocal -- pour une offre bien inférieure à
celle de CNOOC.
Par contre, aux Canadiens, qui vivent dans un pays
plus grand et plus froid, qui dépendent de façon
critique de leur énergie et qui ont renoncé à la
sécurité de leur énergie en signant les accords du
libre-échange -- même si notre industrie est beaucoup
plus contrôlée que celle des États-Unis par les
investissements étrangers -- le gouvernement ne cesse de
répéter que nous n’avons plus besoin de posséder ou
contrôler nos réserves de pétrole ou de gaz.
Tandis que les deux autres pays de l’ALENA ont des
politiques nationales d'énergie centrées sur le soutien
du contrôle domestique, notre ministre des finances,
Ralph Goodale nous faisait savoir l'automne dernier
qu'il était temps pour le Canada de se retirer des
affaires d'énergie. Le gouvernement annonça la vente des
dernières devises de Petro Canada au prix imbattable de
64.50$ la devise -- les prix massacrés avaient fait leur
début en 1991 quand les devises, qui maintenant valent
près de 100$, se vendaient pour $13; même phénomène en
1996 avec les devises à 20$.
La semaine dernière, en Colombie Britannique, le plus
gros rachat étranger après l'acquisition en 2002 de
Westcoast Transmission par Duke Energy de la Caroline du
Sud a eu lieu lorsque la compagnie Kinder Morgan, basée
au Texas, a acquis Terasen -- Gaz C.B. avant sa
privatisation -- la plus grosse compagnie de
distribution de gaz naturel et le plus vaste secteur
privé de services d’eau de l’ouest du Canada. Tous les
acquis de Terasen, pipelines, raffineries, pétrole, gaz
et services d’eau sont inclus dans cette transaction, ce
qui essentiellement prive la Colombie Britannique de
tout contrôle domestique de son énergie.
Alors que nous vivons à une époque unique
caractérisée par une soif insatiable d'énergie, entourés
de pays qui se débattent pour s’approvisionner en
énergie, et que nous voyons nos prix monter, les
Canadiens sont continuellement soumis à cette litanie
que nous devrions être très contents du fait que les
étrangers achètent nos industries et réserves d'énergie.
Le ministre fédéral du commerce, Jim Petersen, a
récemment exprimé sa satisfaction en disant: « Je ne
serais pas surpris de voir les populations du monde
vouloir accéder à notre énergie et de vouloir considérer
nos compagnies comme d'excellents investissements ».
Pendant que le gouvernement dépense des milliards et
passe des lois extraordinaires pour soi–disant nous
protéger des menaces terroristes, réelles ou fictives,
il ne fait rien pour garder le contrôle domestique de
nos réserves de pétrole et de gaz, non renouvelables et
en baisse rapide, ce qui va nous mener à une inflation
en flèche des prix d’énergie, situation menaçante pour
l’industrie, l'agriculture et la consommation
canadiennes.
Tandis que les accords du soi-disant libre-échange
ont permis à l'industrie américaine de pomper l'énergie
canadienne de plus en plus précieuse grâce aux clauses
de l’ALE sur l’obligation du partage proportionnel et de
la fixation des prix (clauses que les Mexicains ont
refusées de signer), avons-nous obtenu un régime
garantissant l'accès et l'application des règlements qui
valait tout cela?
Il faudrait poser la question à l'industrie du bois.
Après maints jugements, d'ailleurs ignorés, en faveur du
Canada par l'ALE et l'ALENA, où en sommes-nous? 5
milliards net pour les États-Unis avec leur tarif. Le
dernier ordre, donné par le jury de l'ALENA, d'annuler
le tarif et de restituer les 5 milliards, a été reçu
avec un bâillement et un refus catégorique des
américains.
Raillerie plus profonde encore à l'égard du
libre-échange lorsque l'argent récolté de ce tarif,
selon la loi américaine, par les autorités américaines a
été distribué aux compagnies qui en premier lieu avaient
lancé ces défis contre les industries du Canada -- un
encouragement continuel pour les compagnies américaines
de cibler l'exportation canadienne et de tenter de lui
imposer des tarifs.
Il suffit que les États-Unis mentionnent leur
sécurité nationale pour que le gouvernement canadien se
mette automatiquement au garde-à-vous, mais qui protège
l'intérêt national du Canada?
La poursuite de ce rêve utopique d’obtenir un accès
sécurisé à l'économie américaine a ruiné l'industrie du
bétail, a abouti à la quasi-totalité du contrôle
américain de notre industrie d'abattage, nous a laissé
avec des défis commerciaux continuels et avec des tarifs
sans précédent de la part des américains sur notre blé
et bois, a fait passer près de 20 000 compagnies
canadiennes (y compris le contrôle d’entières
industries) aux mains des américains en l'espace de
vingt ans et nous nous retrouvons avec en main un sac
plein de cendres au lieu d'un sac plein de pièces d'or
de nos revenus de nos abondantes sources d'énergie.
Il est évident que les États-Unis se sont retirés de
l'ALENA. Cela signifie que nos ressources d'énergie nous
appartiennent à nouveau ainsi que le pouvoir de
déterminer notre cours à suivre dans le monde. Tout ce
qui nous manque seulement ce sont des leaders politiques
capables d'oser de donner aux Canadiens une voie à
suivre dont nous serions tous fiers et de vraies
garanties pour la sécurité de notre avenir.
David Orchard est l'auteur du livre Hors des griffes de
l’aigle - Quatre siècles de résistance à
l’expansionnisme américain et s'est présenté à la
candidature fédérale du chef du Parti Progressiste
Conservateur en 1998 et 2003. Il est agriculteur à
Borden, SK et on peut le joindre par téléphone au (306)
652–7095, et par courriel:
davidorchard@sasktel.net
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