GlobalResearch.ca, (en anglais) mardi 25 juillet
2006
Se tenir debout pour le Canada?
par David Orchard
Depuis deux semaines, le minuscule Liban est pilonné
de la terre, de la mer et du haut des airs par des
bombes, des obus et des missiles à haute technologie.
Ses côtes font l'objet d'un blocus, son aéroport est en
miettes. Plus de soixante ponts ont été détruits; des
routes, des écoles, des ports, des églises, des
mosquées, des dépôts de céréales, des tours de
téléphones, de radio et de télévision, des ambulances,
des centrales électriques, des dépôts de carburant, un
hôpital, une usine de lait, une usine pharmaceutique et
des pâtés de maisons entiers de quartiers résidentiels
ont été pulverisés. De leurs mains nues, des parents
tentent frénétiquement de libérer ceux des leurs qui
sont enterrés vivants.
D'après les sources officielles, 384 civils libanais
sont morts, un tiers d'entre eux des enfants, il y a des
blessés par milliers, quelque 800 000 sans-abris. Les
chiffres augmentent chaque jour.
Un million de touristes, d'expatriés et de "snowbirds",
y compris à peu près 50 000 Canadiens, se sont retrouvés
coincés dans le pays. Vingt civils en fuite ont été
brûlés vifs par des missiles israéliens après qu'on leur
ait ordonné de quitter leurs maisons.
Le gouvernement israélien a déclaré que le
bombardement de son voisin est une réaction à la capture
de deux de ses soldats par des guérilleros du Hezbollah
agissant à partir du Liban et que ses opérations vont
continuer jusqu'à nouvel ordre. Dix-sept civils
israéliens ont été tués par des obus tirés du Liban
après qu'Israël eut commencé ses bombardements.
Le premier ministre du Liban supplie qu'on lui
accorde une intervention internationale et la cessation
des hostilités, disant que son pays a souffert "des
pertes inimaginables" et est "déchiré en lambeaux." Jan
Egeland, Coordinateur des secours d'urgence de l'ONU, a
qualifié les bombardements d'"horrifiants" et de
"violation du droit humanitaire". Le Secrétaire général
des Nations Unies, Kofi Annan, exige un cessez-le-feu
immédiat: "Le recours excessif à la force doit être
condamné. L'usage disproportionné de la force par Israël
et sa punition collective du peuple libanais doivent
cesser."
Le Haut Commissaire des Nations Unies pour les Droits
de l'Homme, Louise Arbour, a émis un avertissement à
propos des crimes de guerre. "Le droit international
exige la responsabilité. Le nombre de morts dans la
région et leur caractère prévisible pourrait engager la
responsabilité pénale personnelle des personnes
impliquées, en particulier de celles aux postes de
commande et de contrôle."
Le Canada est un membre fondateur des Nations Unies
avec une longue histoire d'engagement actif dans les
affaires internationales, le maintien de la paix et la
médiation. L'actuel gouvernement canadien a été élu
récemment avec la promesse de "se tenir debout pour le
Canada." ***
Face à une situation où 50 000 Canadiens étaient
exposés au danger, quelle a été la réaction du
gouvernement? Le nouvel ambassadeur du Canada auprès de
l'ONU, John McNee, a dit au Conseil de Sécurité que
l'action d'Israël au Liban "était un exercice du droit à
l'autodéfense." Le Ministre des Affaires étrangères,
Peter MacKay, a refusé tout net d'endosser l'appel du
Secrétaire général à un cessez-le-feu. Le Premier
ministre Stephen Harper a déclaré: "La réaction d'Israël
a été mesurée, vu les circonstances." Il a annoncé qu'il
était "trop tôt" pour en appeler à un cessez-le-feu. Ces
paroles représentaient en substance un feu vert du
Canada pour que le bombardement continue. Huit Canadiens
en visite, dont quatre enfants, ont été tués par des
bombes israéliennes. Le gouvernement canadien n'a émis
aucune protestation. Est-ce cela que M. Harper entend
par "se tenir debout pour le Canada."?
Chacun peut saisir la difficulté de mettre en œuvre
une évacuation de masse sous les bombes; ce qui n'est ni
compréhensible, ni pardonnable, c'est le refus de notre
gouvernement d'exiger la fin des hostilités générant le
chaos et la souffrance.
La misérable réaction du gouvernement Harper au
meurtre de Canadiens et son refus d'exiger la fin des
bombardements constituent un abandon de son devoir de
protéger les Canadiens et de défendre le règne du droit
au nom de toute l'humanité.
S'il ignore que 400 000 Palestiniens chassés de leurs
terres ont vécu pendant des décennies dans des camps de
réfugiés au Liban; qu'Israël franchit les frontières,
enlève et assassine des Palestiniens, y compris des
dirigeant élus, de façon routinière; qu'il détient plus
de 9 000 personnes dans ses prisons, dont des Libanais;
et si l'on accepte la thèse de M. Harper selon laquelle
le Hezbollah est une organisation terroriste, alors une
comparaison pourrait être effectuée avec un scénario où
la Grande-Bretagne réagirait à la capture de deux de ses
soldats par l'IRA en Irlande du Nord en réduisant en
ruines l'aéroport de Dublin et le reste des
infrastructures de l'Irlande. Qui pourrait défendre une
telle chose comme une réaction "mesurée"?
Gideon Levy, écrivant dans le journal israélien
Haaretz, a dit : "À Gaza, un soldat est enlevé de
l'armée d'un état qui enlève fréquemment des civils dans
leurs foyers et les enferme pour des années sans procès
– mais c'est seulement nous qui avons le droit de faire
cela. Et c'est seulement nous qui avons le droit de
bombarder des centres de population civile."
Que ce soit pour des raisons religieuses ou
idéologiques, notre gouvernement à Ottawa s'est rangé
sans aucun esprit critique du côté d‘un gouvernement
étranger, en l'occurrence celui d'Israël, aux dépens de
nos propres intérêts nationaux en tant que Canadiens et
en tant que membres de la communauté internationale
respectueux de ses lois.
*** « Stand up for Canada », la version anglaise du
slogan conservateur lors des élections fédérale de 2006,
qui n'avait rien à voir avec la version française
officielle: « Changeons pour de vrai » (Note du
traducteur)
David Orchard est l'auteur de Hors des griffes de
l'aigle: Quatre siècles de résistance à l'expansionnisme
américain (Robert Davies, 1998), est fermier à Borden,
SK et a été deux fois candidat de l'ancien Parti
Progressiste-Conservateur du Canada. On peut le
contacter à
davidorchard@sasktel.net, tél.: 306-652-7095
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