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Publié en anglais, Ottawa Citizen le 20 janvier 2006 The beginning of the end. The Conservative party has demonstrated from its origins in 2003 that it can't be trusted »)

Qui va défendre les intérêts du Canada?

de David Orchard

Les élections de lundi sont importantes à bien des égards. Le nouveau Parti conservateur occupe actuellement la première place dans les sondages, mais avant le vote du 23 janvier, il convient de rappeler aux Canadiens les faiblesses intrinsèques de ce Parti depuis sa création, qu’il s’agisse de ses positions sur de grands dossiers nationaux ou de l’éthique de sa conduite.

Sur la scène internationale, M. Harper veut pousser le Canada dans le giron américain. Il est prêt à négocier la participation du Canada au projet américain de défense anti-missiles. Il veut que le Canada renonce à ses engagements de Kyoto et signe un accord « nord-américain ». M. Harper, Stockwell Day, son porte-parole en politique étrangère, et Peter MacKay, son leader-adjoint, ont tous les trois appuyé farouchement l’invasion de l’Iraq par les États-Unis. Alors qu’une grande majorité de Canadiens, francophones et anglophones, estiment que l’ancien premier ministre Jean Chrétien a eu raison de refuser d’y engager le Canada, M. Harper, M. Day et M. MacKay auraient, eux, entraîné le Canada dans une invasion et une occupation illégales de l’Iraq, et le Canada compterait aujourd’hui ses morts en Iraq.

Sur la scène nationale, il est fort possible qu’un référendum soit déclenché pendant la prochaine législature. Qui va mobiliser et représenter les forces fédéralistes au niveau national? Qui va défendre les intérêts du Canada? En 1980, c’était Pierre Trudeau. En 1995, c’était Jean Chrétien. Mais si M. Harper est élu aux prochaines élections, comment va-t-il faire pour convaincre les Québécois de rester au Canada? Ses diatribes passées contre le bilinguisme (« le mythe déboulonné »), ses revendications en faveur d’une forteresse albertaine, son manque d’intérêt et d’attachement pour le Canada français lui interdisent toute percée au Québec. Et il pourra d’autant moins protéger l’unité du pays qu’il a affirmé que « peu importe que le Canada ait un ou deux ou plusieurs gouvernements nationaux ». Seul le Parti libéral a la force et la volonté de préserver l’unité du pays, et l’histoire le prouve.

Quelle est la position du nouveau Parti conservateur au sujet des peuples autochtones, autre composante fondamentale de la société canadienne? L’un des principaux conseillers de M. Harper en la matière est M. Thomas Flanagan, originaire des États-Unis, qui a pour spécialité de s’attaquer aux droits des peuples autochtones. Son livre, intitulé First Nations? Second Thoughts, ridiculise la notion même de droits issus d’un traité. L’Alliance canadienne préconisait la privatisation des réserves autochtones, c’est-à-dire l’assimilation pure et simple des peuples autochtones et de leur culture.

L’agriculture est une composante importante de l’économie canadienne. La Commission canadienne du blé est le plus gros négociant au monde de blé et d’orge; elle est aussi, ce qu’ignorent beaucoup de Canadiens, l’office de commercialisation le plus prestigieux au monde. C’est elle qui rapporte le plus de devises étrangères au Canada, et c’est l’un des derniers bastions des céréaliers de l’Ouest. (Tout récemment, elle a joué un rôle déterminant dans la décision d’interdire le blé génétiquement modifié dans notre pays.) Or, les nouveaux conservateurs ont affirmé à maintes reprises leur intention de démanteler et d’émasculer la Commission. Sans la Commission, notre industrie céréalière passera, quasiment du jour au lendemain, entre les mains des Américains, et nos agriculteurs perdront leurs terres.

M. Harper et ses collègues se disent les amis des agriculteurs, mais ils ont révélé leurs véritables intentions lorsqu’ils ont bloqué les travaux d’une enquête menée par tous les partis sur les profits exorbitants des grandes sociétés américaines de transformation de la viande, au détriment des éleveurs canadiens, pendant la crise de la vache folle.

Le nouveau Parti conservateur a axé sa campagne sur l’éthique. Depuis des mois, M. Harper et M. MacKay nous font de beaux discours sentencieux sur l’honnêteté, l’intégrité et la crédibilité des personnalités publiques et promettent de « faire le ménage » à Ottawa. Mais pour M. Harper et M. MacKay, le mot « éthique » a une certaine signification, dont j’ai personnellement eu l’occasion de faire les frais!

Lors de la dernière course à la direction du Parti progressiste conservateur, en 2003, M. MacKay et moi avions les deux groupes de délégués les plus importants. Avant le dernier tour de scrutin, M. MacKay m’a demandé de l’appuyer. Nous avons négocié une entente, que nous avons couchée sur le papier et signée, et dont la première condition était de n’accepter aucune fusion ou aucun candidat commun avec l’Alliance canadienne. M. MacKay ayant pris cet engagement, mes délégués et moi avons tenu le nôtre en votant pour lui et en lui permettant de devenir chef du Parti progressiste conservateur du Canada.

Qu’a fait ensuite Peter MacKay? M. Harper l’a imploré de renier ses engagements à l’égard des membres du Parti PC et de moi-même et de fusionner le Parti avec celui de l’Alliance canadienne. C’est exactement ce qu’ils ont fait, de façon absolument frauduleuse. Ils se sont arrangés pour que des dizaines de milliers de membres de l’Alliance puissent participer au vote de ratification du Parti PC, étouffant ainsi les voix des membres du Parti PC qui s’opposaient à la fusion avec l’Alliance et à une telle violation des formalités de vote.

Ils se sont ensuite vantés d’avoir obtenu une majorité de 90 p. 100 en faveur de la fusion et ont ainsi détruit le parti fondateur du Canada, non sans en avoir auparavant volé les couleurs, la réputation de parti de centre droite modérée, l’histoire et la moitié du nom. Et ce sont les deux mêmes personnes qui, aujourd’hui, font des sermons sur l’éthique au reste de la classe politique!

Pour toutes ces raisons, j’encourage les Canadiens à y réfléchir à deux fois avant de s’engager à goûter à cette dangereuse potion que M. Harper veut leur faire avaler le 23 janvier.


David Orchard est l’auteur de Hors des griffes de l’aigle – Quatre siècles de résistance canadienne à l’expansionnisme américain. Il a été deux fois candidat à la direction du Parti progressiste conservateur, en 1998 et en 2003. Il exploite une ferme à Borden, SK. On peut le joindre au (306) 652-7095, ou à: davidorchard@sasktel.net, http://www.davidorchard.com

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